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Le Gros Magnus
4 juin 2019

Au Moment Où Je Fais Demi-tour

Emmanuel Thiebot, historien du Mémorial de Caen, qui réside à Saint-Pierre-sur-Dives, était à Strasbourg, mardi soir, à deux pas de l’attaque terroriste. Sans l’intervention d’un passant qui l’a incité à faire demi-tour et s’il ne s’était pas attardé devant un sapin pour prendre en photo les décorations de Noël, il aurait sans doute croisé la route du tueur. Récit. « Je suis arrivé à Strasbourg mardi en fin d’après-midi. Mercredi, je devais être à la Cour européenne des Droits de l’Homme pour la finale régionale du concours de plaidoirie. Mardi soir, je sors de l’hôtel et je décide d’aller faire un tour au marché de Noël. Je connais Strasbourg, j’y suis allé plusieurs fois. » « A 19h 49, j’ai su l’heure précise après, j’entre dans la rue qui va de la place Kléber à celle qui est perpendiculaire à la rue des Orfèvres. Il y a un premier mouvement de foule avec plusieurs personnes qui courent dans ma direction. Certains disaient : faites demi-tour, n’allez pas par là. Sur l’instant je n’ai pas réalisé ce qui se passait, j’ai même pensé à un pickpocket… Un peu plus loin, un homme d’une soixantaine d’années, accompagné de son épouse, fait barrage avec ses bras et me conseille de faire demi-tour. Il ajoute : on tire sur des gens ! Il me regarde droit dans les yeux et me dit une nouvelle fois en me poussant le bras : faites demi-tour. Puis il a commencé à courir ». Quatre coups de feu « Alors que je suis à l’angle de la rue des Orfèvres, il y a un nouveau mouvement de foule, avec des gens apeurés. Au moment où je fais demi-tour, je me retrouve à l’entrée de la place Kléber, mon point de départ, j’entends très distinctement quatre coups de feu. J’ai tout de suite compris que ce n’étaient pas des pétards… Ils sont suivis d’un silence impressionnant. Les gens sont comme tétanisés. On ne sait pas ce qu’il faut faire, où aller ? Tout se passe très vite. Je vois des gens entrer dans le Monoprix. Sans savoir pourquoi je n’y vais pas. Alors que c’est l’abri le plus proche. Je traverse la place en courant pour rejoindre mon hôtel où j’arrive en même temps que d’autres clients. Il y a des gens en panique, dont un couple d’une trentaine d’années avec un enfant. L’homme hurle sur la pauvre standardiste, il pense avoir perdu les clés de sa chambre. A ce moment je ne sais pas encore qu’il s’agit d’une attaque terroriste. Je ne l’apprends qu’une heure plus tard. Je redescends dans le hall et prends une quatrième photo de la place Kléber. Il n’y a plus un bruit, personne dans les rue. D’habitude à cette heure-là, à ce moment de l’année, la place est noire de monde ». « La rue du tueur » « Le lendemain, en voyant le trajet effectué par le meurtrier, je réalise que sans la photo prise quelques secondes avant le drame et sans l’intervention de l’homme qui m’a incité à faire demi-tour, je me serais fatalement trouvé à 19 h 50 dans la rue des Orfèvres. La rue du tueur… » Avant de quitter Strasbourg, Emmanuel Thiebot s’est rendu à la mairie pour signer le livre de condoléances. Hier jeudi après-midi, encore sous le choc, il avait rendez-vous avec un médecin. Il devait également prendre contact avec une cellule d’urgence médico psychologique.

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